
L’exception d’inexécution : un levier de protection contractuelle face au manquement de l’autre partie
Publié le :
18/04/2025
18
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2025
L’adage « pacte sunt servanda » résume un règle fondamentale en droit des contrats : les accords conclus doivent être respectés de bonne foi. Ce principe sous-tend que l’exécution des obligations contractuelles est obligatoire, chacune des parties devant respecter ses engagements.
Toutefois, le Code civil prévoit une exception à cette règle : l’exception d’inexécution. Ce mécanisme permet à une partie de suspendre l’exécution de ses propres obligations si son cocontractant ne répond pas aux siennes.
Les conditions d’application de l’exception d’inexécution
Selon les articles 1103 et 1104 du Code civil, la force obligatoire des contrats impose aux parties de se soumettre à l’exécution de leurs obligations contractuelles. Si l’une des parties ne respecte pas ses obligations, la seconde peut engager une action au titre de l’exception d’inexécution, au sens des articles 1217 et 1219 du Code civil. Deux conditions doivent être réunies :
- L’exigibilité de l’obligation : l’obligation du cocontractant doit être exigible, en ce qu’elle doit être arrivée à terme ou être soumise à un événement précis prévu par le contrat. Cette condition est appréciée souplement : même une créance non sérieusement contestable peut motiver le recours à l’exception d’inexécution, pourvu qu’elle soit certaine ;
- La gravité de l’inexécution : l’inexécution doit être d’une gravité suffisante pour justifier la suspension des obligations. Il doit s’agir d’une réponse proportionnée à la gravité du manquement.
En outre, l’exception d’inexécution peut être invoquée non seulement en cas d’inexécution effective, mais aussi de risque sérieux d’inexécution. En application de l’article 1220 du Code civil, si une partie a de sérieuses raisons de penser que son cocontractant ne respectera pas ses obligations, elle peut suspendre l’exécution de ses propres engagements, sous réserve que le risque d’inexécution soit suffisamment grave.
La mise en œuvre de l’exception d’inexécution
Une fois l’exception d’inexécution invoquée, celle-ci suspend temporairement l’exécution des obligations du créancier, tant que son cocontractant ne s’est pas valablement exécuté. Cette suspension provisoire n’implique pas ipso facto une annulation de l’obligation initiale, mais elle permet à la partie lésée de se protéger contre un manquement substantiel de son cocontractant.
En pratique, la partie qui invoque l’exception d’inexécution doit en informer l’autre partie, souvent par voie recommandée avec demande d’accusé de réception, ou par tout autre moyen permettant de prouver la réception de la notification. Celle-ci peut être utilisée pour suspendre temporairement l’exécution des obligations du contrat.
À défaut, la partie lésée peut également suspendre l’exécution de ses propres obligations, tant que l’autre partie n’a pas exécuté les siennes. À titre d’exemple, un fournisseur peut refuser de livrer des marchandises si le professionnel ne paie pas la facture à la date convenue.
De facto, l’exception d’inexécution constitue un levier puissant en cas de défaillance prolongée de la partie défaillante. Si l’inexécution persiste, le créancier peut avoir recours aux autres sanctions prévues par l’article 1217 du Code civil :
- La résolution du contrat (articles 1224 à 1230 du Code civil) : elle peut intervenir par l’effet d’une clause résolutoire, sinon par la résolution unilatérale à l’initiative du créancier, sous réserve d’avoir mis en demeure au préalable, le débiteur, d’exécuter son obligation dans un délai raisonnable ;
- L’exécution forcée en nature (articles 1221 et 1222 du Code civil) : après une mise en demeure restée infructueuse, le créancier d’une obligation peut en poursuivre l’exécution en nature, sauf si celle-ci est impossible, ou s’il existe une disproportion manifeste entre le coût engendré pour le débiteur et son intérêt pour le créancier ;
- La réduction du prix (article 1223 du Code civil) : lorsque l’exécution des obligations est imparfaite, le créancier peut, sous réserve d’une mise en demeure préalable, notifier au débiteur sa décision d’en réduire proportionnellement le prix.
Historique
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